La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



vendredi 20 janvier 2017

Loué soit Allah pour le Chatterton, c’est vraiment un don des dieux.

Nathan Larson, Le Système nerveux, traduit de l’américain par Patricia Barbe-Girault, publication originale 2012, édité en France par Asphalte.

Lisez-le : on ne s’ennuie pas et on s’amuse bien.
Nous sommes dans un New York d’après la catastrophe : la plupart des infrastructures détruites, une pollution épaisse dans l’air, la ville tout à la fois déserte et en proie à diverses bandes plus ou moins mafieuses. Le héros, Dewey Decimal, est amnésique et suppose qu’il est un ancien militaire amélioré par divers implants. C’est aussi un noir malingre, obsédé par l’hygiène, bourré de troubles obsessifs compulsifs et très soucieux de ces costumes chics. Pour survivre ? Il a un système dans la tête.
Les romans de Larson ne constituent pas une véritable série, mais possèdent un héros et un univers récurrents. Ce volume suit donc Système D. Ici, Dewey enquête sur une histoire vieille de 20 ans, à savoir le meurtre d’une prostituée coréenne, dont est accusé un sénateur. Par ailleurs, il rencontre un homme qui pourrait bien connaître son passé. Et finalement, il ne passe pas tant de temps que cela dans sa chère bibliothèque municipale. Il faut dire qu’il échappe à un nombre hallucinant de tentatives de meurtres.
Ernest Pignon-Ernest, sérigraphie Jean Genet, à Brest.
C’est un plaisir de lecture. Le roman ne s’arrête jamais pour respirer. Ça dégomme et ça castagne sec, mais sans se prendre au sérieux. Les actions et retournements s’enchaînent, avec toujours de l’humour et un certain sens du décalage. Il est difficile de prendre tout cela au sérieux. L’affrontement avec un hélicoptère de combat est une réussite, ainsi que le récit de la plongée dans les eaux hyper contaminées de l’Hudson. Dewey se moque et se sert du racisme, ricane des religions, des politiques néoconservateurs, de la télé. Il est désireux de connaître son passé mais pas au point de tout accepter de la part d’un ennemi (on n’est pas dans le grand dur à la faiblesse intime), d’autant que son goût pour la dérision prend souvent le dessus.


Mais peux pas m’empêcher de penser : du sang sur de la laine, du sang sur de la laine, qu’est-ce que je vais me faire chier à nettoyer ; je me penche par-dessus le gosse en train de postillonner, ce couillon essaie de parler alors qu’il n’a plus qu’une moitié de visage, des bulles rouges à la place de la bouche, ouvre sa portière et je donne un bon coup à ce corps qui va bientôt retourner à la poussière, on fonce quand même à toute vitesse alors il tombe sans protester et disparaît aussitôt, sur ce l’hélico se remet à canarder, perfore le pare-brise avant sans réussir à la faire voler en éclats, vision surréaliste d’une passoire en polycarbonate…

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