La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



mercredi 21 décembre 2016

Il lui faut chercher son bonheur dans une autre sorte de bois.

W. H. Auden, Musée des beaux-Arts1939, dans Poésies choisies, traduit de l’anglais par Jean Lambert.

Sur la souffrance, ils ne se trompaient jamais,
Les Vieux Maîtres : comme ils comprenaient bien
Sa place dans la vie humaine, et qu’elle se produit
Pendant que quelqu’un d’autre est en train de manger ou d’ouvrir une fenêtre ou de passer avec indifférence ;
Et, tandis que les vieux attendent pieusement, passionnément,
La naissance miraculeuse, qu’il faut toujours qu’il se trouve
Des enfants qui ne souhaitaient pas spécialement qu’elle arrive, en train de patiner
Sur un étang au bord de la forêt.

Ils n’oubliaient jamais
Que même l’horrible martyre doit suivre son cours
N’importe comment, dans un coin, quelque lieu en désordre où les chiens continuent à mener leur vie de chiens, et le cheval du tortionnaire
Frotte son innocent derrière contre un arbre.

Dans l’Icare de Bruegel, par exemple : comme tout se détourne
De la catastrophe sans se presser ; le laboureur a pu entendre
Le floc dans l’eau, le cri de désespoir,
Mais pour lui ce n’était pas un échec important ; le soleil brillait
Comme il devait sur la blancheur des jambes disparaissant dans l’eau verte,
Et le coûteux, le délicat navire qui avait dû voir
Quelque chose de stupéfiant, un garçon précipité du ciel,
Avait quelque part où aller et poursuivait tranquillement sa course.

Icare, tableau attribué à Brueghel l'Ancien, conservé aux Musées royaux des beaux-arts de Belgique, où Icare n'est plus qu'une paire de jambes disparaissant dans l'indifférence générale. Wikipedia.

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