La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



vendredi 13 mai 2016

La femme qui vous a pondu n'a pas perdu son temps.

Honoré de Balzac, Le Médecin de campagne, 1833.

Un pendant plein d'humanité au Curé de village.

Le héros, Genestas, est un militaire, un ancien des armées de Napoléon. Il suit pendant une journée le médecin Benassis, homme providentiel d'un village du massif de la Chartreuse, afin de sonder son caractère avant de lui présenter une requête bien particulière. Benassis est le type de héros balzacien à qui tout était promis, mais que la fréquentation des salons parisiens a perdu. Il se rachète en faisant œuvre civilisatrice dans une campagne désolée dont il est le philanthrope éclairé. Dans le Curé de village, nous voyions le grand œuvre en train de s'opérer alors qu'ici le développement est achevé. Autre différence : si le médecin est croyant, il est beaucoup moins question de rachat et de rédemption. C'est tout de même pour Balzac l'occasion de développer sa vision de la société (très conservatrice) et comme dans le Curé certains longs discours font figure de pensum. Il est question des bienfaits de la modernité, du commerce et de l’éducation, des danger du suffrage universel et de la démocratie et du rôle indispensable du père de famille.
L. Guétal, Le lac de l'Eyhcauda, 1886 Grenoble, musée municipal
Heureusement le roman possède également de longs passages sur la beauté des paysages alpins et sur les charmes d'une agriculture prospère – j'ai déjà parlé ici du Balzac gentleman Farmer (Le Lys dans la vallée) – située à l'opposé des vices et des fausses beautés des grandes villes.
Curiosité : plusieurs personnages, dont Genestas, sont des soldats de Napoléon. La France de Balzac semble manquer de grand homme capable de développer le pays, mais l'empereur n'est pas évoqué par ses réalisations, mais à travers le regard affectueux et naïf de ces grognards. Chacun de ces héroïques soldats semble être un avatar du colonel Chabert.


Il y eut un moment de silence, pendant lequel les deux cavaliers regardèrent ce débris des soldats de bronze que Napoléon avait triés dans trois générations. Gondrin était certes un bel échantillon de cette masse indestructible qui se brisa sans rompre.

2 commentaires:

Alex Mot-à-Mots a dit…

J'avais beaucoup aimé ce personnage.

nathalie a dit…

Oui le médecin comme le soldat sont bien brossés, à traits vifs, et ils sont assez attachants.