La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



vendredi 8 janvier 2016

Donc, il faut que le Canada soit ce que la France a été: la terre du dévouement, de l'honneur, de la foi.

Laure Conan, Si les Canadiennes le voulaient !, paru en 1886, édité en France par Caillon Dorriotz.

Voici un très court texte, une sorte de pièce de théâtre, un petit texte politique très engagé aussi.
La conversation se tient entre une dame, un monsieur et une demoiselle quelque temps après des élections provinciales québécoises. Le thème en est le patriotisme : comment faire pour que tous les francophones (et pas seulement les politiques) soient fiers de leur culture ? Apparemment les femmes peuvent beaucoup, car elles sont mères et éducatrices et aussi car ce sont elles qui peuvent le mieux transmettre les valeurs chrétiennes.

Il n'y a pas de mots pour dire à quel point le patriotisme est exposé dans notre arène politique.  C'est comme une étincelle dans la boue, ou, si vous l'aimez mieux, comme une étincelle sur un pavé glacé, exposé à tous les vents. 

Ce texte est parfaitement de son époque ! Fin XIXe siècle, on est en plein éveil des nations et rien d’étonnant à ce que les Québécois francophones s’inquiètent de leur avenir au sein du Canada. L’auteur semble avoir un vrai goût pour l’histoire si j’en juge par la vision qui est développée de la France et de l’Angleterre.
Le rôle dévolu aux femmes est également d’une merveilleuse ambiguïté : tout en leur confiant l’éducation, la religion et le soutien aux grands hommes, les voici investies d’une mission redoutablement politique – il n’est pas si courant d’associer femmes et patriotisme. Cela n’empêche pas nos personnages d’être effarés par la question du droit de vote des femmes.
C. Huot, La Leçon de couture, 1886, musée des beaux-arts de Montréal
En contexte québécois (c’est-à-dire catholique, face à l’Angleterre protestante) la foi doit éclairer et soutenir les individus et les peuples. Ainsi il n’est pas question de se réclamer de la Révolution française, il est préférable de se proclamer descendants des Vendéens (c’est tout de même curieux).
Il est également intéressant de lire ce texte en décembre 2015 : après des élections déprimantes et dans un contexte où le patriotisme est brandi à cors et à cris, mais par un personnel politique d’une médiocrité affligeante. Tout ne semble pas réservé au passé.

- Mais, avez-vous jamais remarqué une chose ? à bord du vaisseau de l'État, il n'y a pas de passagers.
- Nous sommes tous des manœuvres ?
- Sans doute. Il n'y a pas une créature humaine qui ne puisse, par conséquent qui ne doive faire quelque chose pour la patrie, quand ce ne serait que par le travail sur soi-même.

Pour mémoire, je vous rappelle l’épisode de la robe à crinoline symbole de modernité aux Escoumins.

Merci à l’éditeur Caillou Dorriotz pour cette lecture.




2 commentaires:

Caillon Dorriotz a dit…

Merci beaucoup pour cet article !

nathalie a dit…

Je vais essayer de prendre le temps de regarder les notes pour voir si certaines sont à améliorer. Merci pour la lecture !